Les pratiques de l'interopérabilité : évolution et prospective

Les normes, lois et règlements, et les assurances

Bien évidemment, le Plan Bâtiment-Grenelle prévoit déjà un certain nombre de recommandations, évolution qui en 2050 sera non seulement effective, mais dépassée.

Tout d'abord, le standard IFC étant enfin devenu une norme ISO[1] à part entière, toute procédure administrative concernant les études du Bâtiment devra obligatoirement être soumise à cette norme, adoptée par un nombre de pays industrialisés encore plus important (vraisemblablement l'Inde, à la population ayant dépassé celle de la Chine, qui a fini par l'adopter aussi). Ce qui représente avec les autres pays industrialisés de l'Europe, de l'Amérique du Nord, de l'Asie du Sud-est et de l'Australie plus de la moitié de la population du globe.

Donc les études de projet pour le Secteur Public seront obligatoirement effectuées par des équipes interopérables avec un BIM et des logiciels également normalisés.

Par ailleurs, le contexte administratif a évolué avec l'interopérabilité :

  • les concours (voir 14.4.6),

  • les permis d'aménager (anciens permis de construire), extraits numériques du BIM alimentant les logiciels administratifs pour le calcul des diverses taxes locales, automatisant les tâches de saisie, de traitement, d'archivage.

  • les différentes étapes de l'ancienne loi MOP[2] (laquelle a été complètement remise en question, marginalisée ou remaniée),

  • spécialement les dossiers d'appels d'offres dématérialisés sous la forme d'une image numérique contractuelle du BIM à l'instant t,

  • De même pour les plans de récolement, fournis par les entreprises sous forme normalisée, pour mise à jour du BIM. Ces fichiers IFC servent pour à la fois la réception des ouvrages, la conformité, et la livraison de l'image numérique à la GTP, le calcul des taxes foncières mais aussi des taxes d'habitation.

Pour l'État, on le constate, la portée de la généralisation du BIM dépasse l'aspect technique pour permettre la réorganisation de certains services techniques :

  • Instruction des demandes de permis et archives,

  • Cadastre,

  • Impôts des collectivités locales,

Ce qui autorise une simplification, une efficacité, une rapidité de réponse des services publics, tout en abaissant les charges sociales en augmentant la compétitivité du secteur public.

Pour le Secteur Privé, les obligations et avantages du recours à la norme sont du même ordre, amplifiés par le chiffre d'affaire de tout le secteur du Bâtiment et de son économie nationale.

D'abord incitative, le recours à la norme est devenu obligatoire. Donc l'utilisation du BIM normalisé aussi, puisqu'un particulier, même pour une requalification de l'existant, doit fournir un dossier numérique IFC.

C'est-à-dire avoir recours à une équipe interopérable pour les études (garantie du respect de la réglementation et recherche du plus faible coût des travaux), ainsi que pour le dépôt des autorisations administratives et des déclarations de fin de travaux.

Cependant, pour des aménagements et travaux de faible impact environnemental, qui ne mobilise qu'un ou deux architecte-ingénieur, il est autorisé de fournir uniquement un fichier d'échange IFC. Les deux niveaux de l'interopérabilité continuent donc de cohabiter.

En fin de compte, il existe moins de différences pour l'environnement réglementaire entre les secteurs public et privé qu'aujourd'hui.

Les différents règlements concernant le respect de l'environnement sous tous ses aspects ont continuellement évolué. Ils se sont harmonisés en Europe, et se sont enfin étendus aux pays pollueurs.

En particulier le nombre de bâtiments en France à énergie positive dépasse ceux qui sont seulement à basse consommation.

Mais certainement, il faudra encore du temps pour que la totalité du patrimoine bâti privé soit « requalifié ».

Examinons aussi ce qui s'est passé vers 2050 pour le métier d'assureur, partenaire craint et critiqué des architectes, ingénieurs et autres acteurs du bâtiment.

Les experts appelés à donner leur avis sur les sinistres parviennent aujourd'hui à un constat alarmant : rares sont les opérations de construction qui s'achèvent sans malfaçons.

Les procès encombrent les tribunaux.

Cette généralisation des sinistres provoque une augmentation continue des primes d'assurances, supportée par les principaux partenaires (architectes, cabinets d'ingénierie, entreprises). Ce qui leur fait dire que la construction d'immeubles et de maisons individuelles est en partie financée par les assurances.

Assurément, l'interopérabilité devrait corriger cette navrante déviation du rôle des assurances, dont le recours est normalement prévu pour les seuls accidents et fautes exceptionnelles.

On peut donc prévoir en 2050 un retour à des primes plus raisonnables, ce que souhaitent les assureurs eux-mêmes.

Un autre aspect juridique sera vraisemblablement corrigé : la mise en cause systématique et solidaire de l'architecte et de l'entreprise en cas de litige. En effet, le BIM permet de garder la trace des responsabilités contractuelles, attachées à chaque objet et à chaque ouvrage du Bâtiment. Enfin une possibilité de rendre à César ce qui lui appartient !

  1. ISO : "International Organization for Standardization". Organisation internationale de normalisation, qui spécifie en particulier les normes de communication en informatique. L'ISO dépend de l'ONU.

  2. MOP : Maitrise d'oUvrage Publique

PrécédentPrécédentSuivantSuivant
AccueilAccueilImprimerImprimerRéalisé avec Scenari (nouvelle fenêtre)