Les pratiques de l'interopérabilité : évolution et prospective

L'économiste

Son rôle traditionnel ne change pas fondamentalement, si non que le BIM supprime ou minimise ses tâches improductives situées dans l'environnement du calcul de métré et du devis estimatif.

Ce qui transforme ses modalités d'intervention en les renforçant.

Tout d'abord, la différence entre estimation rapide (basée sur des approximations statistiques), et estimation détaillée (basée sur des quantités analytiques), s'estompe.

Le métreur disparaît au profit de l'économiste. L'ancien partenaire n'a en effet plus à se préoccuper ni de la saisie du projet, ou du bâtiment à rénover, ni de son découpage en ouvrages et composants, ni de la concordance entre plans graphiques et descriptif, ni de distinction de méthode de calcul, puisque le langage d'accès au BIM est capable de lui fournir instantanément les quantités analytiques sur requête, sous la forme d'un fichier normalisé IFC. Avec en prime la prescription initiale ou courante des concepteurs.

Et même l'historique des modifications descriptives apportées par ses partenaires.

L'économiste peut donc se concentrer sur ses deux autres véritables compétences :

  • évaluer la mise en œuvre en fonction de la technologie du système constructif et de la technologie de chantier, et de son environnement « durable » (correcteurs pour l'achat groupé, l'approvisionnement qui est fonction de la localisation du chantier, le stockage, les déchets, ...).

  • Contrôler le début de la prescription si elle existe, ou l'assurer complètement en fonction des particularités régionales et de la pertinence des équipements à choisir (notamment en fonction des réglementations et habitudes locales).

Tout l'art de l'économiste réside à trouver le meilleur rapport Qualité / Prix.

Pour l'aider, il accède à distance à des séries ou bordereaux de prix, tenues à jour par sa Fédération ou des organismes privés, ou à l'aide de son patrimoine de prix statistiques.

Il est de plus connecté en ligne avec les catalogues électroniques de composants et matériaux des industriels et de l'offre spécialisée, très performants et complets en 2050 ( ?).

La rapidité de réponse de l'économiste est ainsi garantie. C'est essentiel, car il est consulté continuellement pendant le déroulement des études chaque fois qu'une option est envisagée.

A tout moment, de l'esquisse jusqu'aux appels d'offres. Et par n'importe quel partenaire.

La « simulation » est permanente.

Ce nouvel aspect, qui rend central l'intervention de l'économiste, le prédispose peut être à devenir aussi l'Administrateur du BIM ?

Son outil interactif lui permet même de travailler en direct avec les entreprises pressenties pour affiner les prix unitaires de mise en œuvre, si celles-ci sont connectées au BIM dans les deux sens.

Mais on touche à ce moment aux domaines réservés des secrets du savoir faire.

Par exemple, l'entreprises recommence toujours à chiffrer l'ouvrage selon ses propre méthodes et le contexte du chantier, en ignorant les documents d'évaluation soumis.

De ce point de vue, ce sera l'obstacle le plus difficile à résoudre pour généraliser l'interopérabilité au-delà de la maîtrise d'œuvre : le cloisonnement voulu des informations stratégiques d'un métier de l'exécution, toujours prêt à extraire de l'information du BIM. Mais s'interdisant l'échange dans le sens retour. Voir le paragraphe 14.4.8.

Il risque donc d'exister physiquement un BIM pour la Maîtrise d'œuvre, et son image à l'usage exclusif de l'entreprise, dont la durée de vie s'éteindra avec celle de la garantie contractuelle des ouvrages exécutés. Un filtre devrait néanmoins permettre les échanges entre les deux BIM.

Cette dérogation à l'universalité du BIM fait dire à certains experts, comme Jean-Michel Dossier, que le cercle vertueux de l'information du Bâtiment risque de ne jamais exister, sauf si la participation de ce maillon incontournable à la maîtrise d'œuvre que sont les Entreprises devenait effective, afin de faire progresser les interactions d'informations dans le sens construction vers conception.

Dans ces conditions, et comme l'architecte, les pratiques des marchés Conception-Construction ont eu pour conséquence de redéfinir le cadre contractuel des missions de l'économiste : il intervient soit avec un statut d'indépendant dans une équipe interopérable, soit au contraire il est inclus dans une organisation dirigée par une entreprise, et à ce titre il devient un spécialiste de l'économie de la technologie de construction utilisée par l'entreprise, et de sa mise en œuvre.

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