Evaluation et gestion des risques
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Démarche semi-probabiliste

Fondamental :

Le schéma ci-dessous donne une vue d'ensemble de la démarche dans le cas particulier de la vérification de résistance des éléments structuraux. Elle montre les liens logiques principaux entre les différentes étapes du processus.

Schéma général
Schéma général[Zoom...]

Durée de vie du projet

La durée de vie du projet est quelque fois fixée explicitement par le programme, mais elle est plus généralement suggérée par la maîtrise d'œuvre en référence aux règles de l'art, aux contraintes urbanistiques ou aux règles de conception. Quoiqu'il en soit, cette durée doit être en correspondance avec la durée de référence retenue pour la définition des actions appliquées à l'ouvrage. L'Annexe Nationale A1 de l'EC0 fixe les valeurs suivantes des durées d'utilisation de projet pour les éléments structuraux :

  • 10 ans pour la catégorie 1 (structures provisoires),

  • 25 ans pour les catégories 2 et 3 (structures agricoles),

  • 50 ans pour la catégorie 4 (bâtiments et structures courantes),

  • 100 ans pour la catégorie 5 (ouvrages d'art et structures monumerntales).

Situations de projet

Les situations de projet doivent couvrir toutes les situations physiques qu'il est raisonnable de s'attendre à rencontrer lors de l'exécution et de l'utilisation de la structure. Elles imposent ainsi les modes de défaillance potentiels des éléments structuraux.

Dans les applications pratiques, les situations de projet sont classées en :

  • Situations durables, qui font référence aux conditions d'utilisation normale;

  • Situations transitoires, qui font référence à des conditions temporaires applicables à la structure, par exemple lors de son exécution ou de réparations;

  • Situations accidentelles, qui font référence à des conditions exceptionnelles applicables à la structure ou à son exposition, par exemple à un incendie, une explosion, un choc;

  • Situations sismiques, qui font référence aux conditions exceptionnelles applicables à la structure lors de tremblements de terre.

États limites

Ils constituent les phénomènes à éviter, et qui ne doivent pas être atteints ou dépassés avec une probabilité fixée a priori, sur la base de ce qu'il est raisonnable d'accepter pour un coup économique limité.

Les états limites sont classés en deux familles :

  • Les états limites ultimes ;

  • Les états limites de service; ces derniers étant eux-mêmes subdivisés, par exemple, selon que le dommage est lié ou non à la durée de dépassement de l'état limite considéré.

L'intérêt d'une telle classification est essentiellement pratique : il s'agit d'unifier, dans chaque catégorie, les probabilités d'occurrence des états limites ou des effets des actions correspondants afin que la plus grande partie des applications soit commune au plus grand nombre possible de calculs justificatifs.

À titre indicatif, les niveaux de probabilités associés aux états limites pour une durée de référence de 50 ans se situent approximativement dans des plages suivantes :

  • de 10–2 à 10–1 pour les états limites de service,

  • de 10–6 à 10–3 pour les états limites ultimes.

États limites ultimes

Sur le plan pratique, les modes de rupture considérés sont :

  • La perte d'équilibre statique de la structure ou de l'une de ses parties, considérées comme un corps rigide, couvrant les phénomènes de renversement, de soulèvement, et de glissement avec ou sans frottement ;

  • La défaillance par déformation excessive (par exemple, une déformation entraînant une sortie de la structure de ses appuis ou entraînant une défaillance structurale par instabilité mécanique), par transformation de la structure ou de l'une quelconque de ses parties en mécanisme, par rupture, par perte de stabilité de forme (effets du second ordre) ;

  • La défaillance due à la fatigue ou autres effets dépendant du temps.

Les états limites ultimes de fatigue constituent une catégorie particulière pour plusieurs raisons :

  • Les charges de fatigue sont différentes des autres charges car elles se composent plutôt de charges correspondant aux conditions de service, mais assorties d'effets du temps (par exemple, un nombre de cycles) ;

  • Les effets de la fatigue sont des détériorations locales du matériau qui peuvent être bénignes lorsque les fissures entraînent une réduction des contraintes et peuvent même stopper leur développement, ou malignes lorsque les fissures conduisent à des conditions de sollicitation plus sévères accélérant leur développement ;

  • Sous certaines conditions particulières (par exemple, si le matériau est d'une ductilité suffisante), la croissance des fissures peut être détectée dans le cadre des inspections régulières avant que ne surviennent des effets accidentels dus à une insuffisance de résistance ou de ductilité.

États limites de service

Ils sont définis en tenant compte des conditions d'exploitation ou de durabilité de la construction ou de l'un de ses éléments : leur dépassement une ou plusieurs fois entraîne des dommages matériels ou empêche des conditions normales d'exploitation, sans qu'il puisse en résulter, du moins à court terme, la ruine de la construction. Se placent dans cette catégorie, par exemple, les vibrations excessives ou la formation de fissures (dépassement une seule fois) et leur réouverture (dépassement plusieurs fois de l'état limite) dans une structure en béton. Les déformations excessives provoquant des dommages aux cloisons d'un bâtiment, les tassements et autres déplacements d'appuis entraînant l'apparition de telles déformations ou de fissurations préjudiciables à l'aspect ou à la durabilité, sont encore des exemples d'états limites de service. Une distinction doit être faite, le cas échéant, entre les états limites de service réversibles et irréversibles. À cette distinction se rattache le choix des combinaisons d'actions à considérer.

Actions

Les actions sont l'objet de diverses classifications, schématiques, facilitant la formation de leurs combinaisons. La classification la plus utilisée, dans les applications pratiques courantes, est celle qui établit une distinction entre actions permanentes, actions variables et actions accidentelles.

Actions permanentes

Les actions permanentes (notées G) sont des actions dont la durée d'application est égale à la durée de vie de la structure (poids propre); elles peuvent être constantes ou connaître de faibles variations au cours du temps. Sont également rangées dans cette catégorie les actions qui, comme la précontrainte ou le retrait du béton, présentent dans le temps une variation monotone en tendant vers une limite.

Les actions permanentes sont représentées par une seule valeur caractéristique Gk si leur variabilité est faible, et par deux valeurs caractéristiques (maximale Gk,sup, et minimale Gk,inf) si cette variabilité n'est pas négligeable. En admettant qu'il existe des informations statistiques suffisantes, des valeurs caractéristiques sont choisies telles que la probabilité pour que la valeur réelle de l'action les dépasse (dans un sens ou dans l'autre) soit inférieure à 5 %, la fonction de répartition étant supposée normale.

Actions variables

Les actions variables (notées Q) sont des actions à occurrences discrètes plus ou moins ponctuelles dans le temps ou à caractères (intensité, direction, etc.) variables dans le temps et non monotones (neige, vent, température, houle par exemple).

Les principales valeurs représentatives d'une action variable qui peuvent intervenir dans les combinaisons d'actions sont :

  • La valeur caractéristique, notée Qk;

  • La valeur de combinaison, notée ψ0Qk;

  • La valeur fréquente, notée ψ1Qk;

  • La valeur quasi permanente, notée ψ2Qk.

Les valeurs fréquente et quasi permanente sont des propriétés intrinsèques de l'action variable considérée et les coefficients ψ1 et ψ2 sont des quotients, par la valeur caractéristique, d'autres valeurs déterminées directement. Il n'en va pas de même du coefficient ψ0, appelé coefficient de combinaison, qui fixe le niveau d'intensité d'une action variable non dominante, c'est-à-dire lorsqu'elle est prise en compte, dans les calculs, en même temps qu'une autre action variable dite dominante affectée de sa valeur caractéristique.

L'étude d'une action variable repose sur la distribution statistique des maxima de son intensité au cours d'intervalles élémentaires choisis de façon que ces maxima puissent être considérés comme indépendants. Cette distribution statistique permet d'identifier un type de loi de probabilité, une valeur moyenne et un coefficient de variation.

Pour les actions d'origine climatique, il est préférable de s'intéresser à la distribution des maxima annuels : en effet, en procédant de la sorte, les effets saisonniers sont éliminés et il est alors possible de considérer (même si ce n'est pas rigoureusement exact) que les maxima annuels ne sont pas corrélés d'une année à l'autre. Pour les charges sur les planchers de bâtiments, l'intervalle élémentaire est de l'ordre de 5 ans (immeuble de bureaux) à 7 ans (immeuble d'habitation). C'est la durée au bout de laquelle les conditions d'occupation des locaux peuvent être totalement modifiées.

La comparaison des actions variables traitées par des méthodes probabilistes n'a donc de sens que par rapport à un intervalle de temps donné, qui peut être choisi a priori et qui est appelé durée de référence (R).

La valeur caractéristique d'une action variable est définie comme étant celle qui présente une probabilité pR, acceptée a priori, d'être atteinte ou dépassée du côté des valeurs les plus défavorables au cours de la durée de référence R.

De manière générale, la période de retour d'une valeur particulière est la durée moyenne entre deux dépassements de ladite valeur. Les trois paramètres :

  • Probabilité pR (supposée faible), définie par pR = Prob(X >x) ;

  • Durée de référence R ;

  • Période de retour T(x) de la valeur x, sont liés par la relation :

    T(x) = R/ln(1-pR) ≈ R/pR

Pour la plupart des actions variables climatiques (neige, vent, température, etc.), ainsi que pour les charges d'exploitation sur les planchers de bâtiments, la valeur caractéristique correspond à une probabilité de dépassement égale à pR = 0,02 par an (R = 1 an), pour l'action elle-même ou pour un paramètre spécifique auquel elle est liée, ou, autrement dit, à une période de retour de : 1/0,02 = 50 ans. La valeur caractéristique des charges d'exploitation non exceptionnelles sur les ponts routiers est définie, dans la partie 2 de l'EC1, sur la base d'une période de retour de 1 000 ans, soit une probabilité de dépassement pR de 0,05 en R = 50 ans. Quant à la valeur caractéristique de l'action sismique, elle est fixée, dans l'EC8, sur la base d'une période de retour de 475 ans, correspondant à une probabilité de dépassement de 0,1 en 50 ans.

La valeur fréquente d'une action variable est principalement associée à des états limites de service dont l'apparition dépend d'interventions répétées d'une action (par exemple, déformations gênantes, oscillations, etc.).

En ce qui concerne la valeur quasi permanente, elle est essentiellement à considérer lorsque l'on étudie l'effet d'actions de longue durée d'application, par exemple pour certains calculs de fluage du béton. Elle intervient aussi en accompagnement des actions accidentelles ou sismiques. Elle est généralement définie de façon théorique comme valeur moyenne dans le temps. Pour les charges sur les planchers de bâtiments, elle est généralement choisie de façon que la fraction de temps au cours de laquelle elle est dépassée soit égale à 50 % de la durée de référence.

Actions accidentelles

Exceptionnelles, mal prévisibles, les actions accidentelles (notées A) sont en général de courte durée d'application et souvent évitables (explosions, chocs, incendie par exemple). Si des données suffisantes pour un traitement statistique sont disponibles, une valeur caractéristique peut être déterminée, ce qui permet de déduire une valeur représentative à introduire dans les combinaisons d'actions de la même manière que les actions variables. Dans le cas contraire (cas le plus fréquent), ladite valeur représentative unique est déterminée directement dans la mesure où, du fait de leur caractère accidentel, trop peu de données sont disponibles pour appliquer de façon pertinente les méthodes statistiques. L'action sismique (notée AE) est traitée différemment d'une action accidentelle.

Valeurs de calcul des actions

Les actions sont introduites dans les modèles de calcul avec des valeurs particulières appelées valeurs de calcul, afin de déterminer leurs effets.

La valeur de calcul Fd d'une action F est obtenue en multipliant sa valeur représentative notée Frep et valant ψFk (ψ pouvant être égale à 1, ψ0, ψ1 ou ψ2) par un coefficient partiel γf, soit :

Fd = γf Frep = γf ψFk

γf est un coefficient partiel destiné à couvrir, de manière générale, les incertitudes sur le choix de la valeur caractéristique de l'action F et, parfois, une partie des incertitudes liées au modèle de l'action.

Combinaisons d'actions

Principe des combinaisons d'actions

Lorsqu'une construction particulière est étudiée, plusieurs actions sont à prendre en compte simultanément, si cette simultanéité peut se produire physiquement.

Il y a lieu alors de considérer des combinaisons dans lesquelles ces actions sont introduites avec différentes valeurs représentatives Frep liées :

  • Soit au fait que, lors des calculs justificatifs, plusieurs actions sont combinées et que toutes ces actions ne doivent pas être prises en compte simultanément avec un niveau d'intensité élevé ;

  • soit à la considération d'un nombre de répétitions ou d'une durée d'application.

Considérons la combinaison linéaire de deux actions variables X et Y. L'un des objectifs de la méthode semi-probabiliste est de sélectionner un nombre limité de couples de valeurs (x,y) couvrant les effets de l'application simultanée des actions X et Y au plus grand nombre d'éléments structuraux dans des proportions variables, et correspondant à une probabilité d'occurrence inférieure ou égale à la probabilité d'occurrence de l'une ou de l'autre des actions, considérées avec leurs valeurs caractéristiques.

Pour une proportion donnée des actions X et Y (ou, plus précisément, de leurs effets) : Z = aX "+" bY (le symbole "" signifie "doit être combiné à"), il existe une infinité de couples (x, y) correspondant à une probabilité P d'occurrence de la combinaison considérée, situés sur une droite du plan des valeurs de X et Y. Lorsque la proportion varie (c'est-à-dire lorsque a et b varient), la famille de droites ainsi constituée enveloppe une courbe C (P) dont il peut être démontré qu'elle est convexe, figure ci-dessous :

Interaction entre deux actions variables
Interaction entre deux actions variables[Zoom...]

Deux combinaisons enveloppantes, correspondant aux points I et J sont déterminées à l'aide d'une tangente intermédiaire. Leur signification est la suivante : lorsque l'une des actions est prise en compte avec sa valeur caractéristique (Xk ou Yk), l'autre action est prise en compte avec une valeur réduite, dite valeur d'accompagnement (respectivement ψ0yYk ou ψ0x Xk). Le coefficient ψ0 est appelé coefficient de combinaison.

Le principe de base pour la formation des combinaisons de plusieurs actions est que les effets de plusieurs actions variables prises avec leur valeur caractéristique ne se cumulent pas, pour la simple raison que le résultat d'une telle combinaison serait bien trop défavorable sur un plan économique. Les actions variables sont donc tour à tour sélectionnées et qualifiées d'action dominante. À l'instant où l'action variable dominante atteint sa valeur caractéristique, toutes les autres actions variables (qualifiées d'actions d'accompagnement) atteignent une valeur inférieure à leur valeur caractéristique, appelée valeur de combinaison. L'ensemble constitué par les actions permanentes, l'action variable dominante et les actions variables d'accompagnement forme une combinaison d'actions.

Il est à noter que les combinaisons ainsi formées ne sont pas systématiquement du côté de la sécurité, car il est fort possible que la situation la plus défavorable se produise à un instant où aucune action variable n'atteint sa valeur caractéristique. Il n'en reste pas moins que cette règle permet d'approcher de manière suffisamment étroite dans la plupart des cas les situations les plus défavorables.

Formation des combinaisons d'actions

Chacune des combinaisons formées pour le calcul des ouvrages est axée sur une action dominante qui peut être une action variable, une action accidentelle ou une action sismique. Lorsque l'action dominante est une action variable, les autres actions variables sont introduites (si leur présence simultanée avec ladite action variable dominante est physiquement possible) avec leurs valeurs de combinaison (ψ0i Qki ). Dans les autres cas, les actions variables sont le plus souvent considérées avec leur valeur quasi permanente.

Les combinaisons possibles étant très nombreuses, seules les plus « agressives » vis-à-vis de l'effet considéré sont à prendre en compte ; celles qui sont manifestement couvertes par une combinaison plus défavorable n'ont pas à figurer dans les justifications.

Exemple :

Par exemple, l'EN 1991-1-3 « Charges de neige » autorise, selon l'endroit, de considérer une charge « accidentelle ».

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