Historique, vocabulaire, perception
CoursOutils transverses

Responsabilité juridique

En droit, il convient de distinguer trois types de responsabilité [Gomez-Varona, 2000] :

  • la responsabilité administrative, qui peut incomber à une personne de droit public pour les dommages causés aux particuliers ou sociétés dans le cadre de l'exécution d'un contrat, par exemple pour un marché public. Le contentieux relève alors du Tribunal administratif;

  • la responsabilité pénale, qui vise à sanctionner des infractions (manquements aux règles de droit). Elle n'est engagée que s'il y a commission d'un acte expressément interdit par la loi. Ainsi, l'Article 221-6 du Code Pénal prévoit des sanctions pour les homicides ou coups et blessures : « Le fait de causer, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou les règlements, la mort d'autrui, constitue un homicide involontaire puni de trois ans d'emprisonnement et de 300 000 F d'amende ». L'action au pénal peut mettre en cause l'ensemble des intervenants d'un projet : services administratifs, architectes, bureaux d'étude, constructeurs, contrôleurs, exploitants. Par exemple, dans la catastrophe du Grand-Bornand, causée par une crue subite du Borne, on a examiné l'historique des crues depuis un siècle et conclu qu'avec des études plus approfondies, l'implantation du camping dévasté aurait due être jugée dangereuse et interdite. Il y avait donc eu négligence et mise en danger de la vie d'autrui, sanctionnable au pénal jusqu'à l'échelon préfectoral [Lemoine, 2000];

  • la responsabilité civile, obligation qui incombe à une personne de réparer le dommage causé à autrui. Elle relève du domaine des risques assurables. La charge de la preuve incombe à la victime, qui doit démontrer la faute (violation d'une règle de droit, d'un règlement...), le caractère direct et certain du dommage, et le lien de causalité entre la faute et le dommage.

Deux notions récentes élargissent considérablement le champ des responsabilités : la mise en danger de la vie d'autrui, et le principe de précaution (cf. chapitre 3). Désormais, « ...une faute, même non intentionnelle [...] est de nature à engager la responsabilité pénale de celui qui est l'origine du dommage, mais également de ceux qui, à des degrés divers, de près ou de loin, y ont contribué ». Dès lors, comment apprécier si une décision peut se trouver à l'origine d'un accident ? L'existence d'un risque résiduel, quelles que soient les décisions prises, laisse au juge un pouvoir d'appréciation considérable. Les acteurs du génie civil, qu'ils soient maîtres de l'ouvrage, concepteurs, architectes, exécutants ou contrôleurs, doivent exercer la plus grande vigilance, sauf à mettre leur responsabilité en jeu [Lemoine, 2000]. P. Habib s'inquiète des répercussions du « principe de précaution » sur la mise en cause potentielle, y compris juridique, de l'ingénieur, en particulier en géotechnique où les décisions sont très souvent prises alors que le contexte n'est que partiellement et imparfaitement connu [Habib, 2001].

A terme, le développement et la diffusion d'une « culture de la précaution » pourrait avoir pour conséquence de faire évoluer les notions de responsabilité civile et pénale. Kourilsky souligne que « [...] le législateur, l'autorité réglementaire et le juge peuvent faire du principe de précaution le meilleur ou le pire des usages. Le meilleur, s'ils adoptent des mesures qui améliorent véritablement la sécurité des citoyens, le pire s'ils en font un carcan dépourvu de souplesse, un frein à l'innovation et au progrès » [Kourilsky, 1999].

Les missions de l'ingénieur et ses responsabilités (page suivante)La recherche de responsables (page Précédente)
AccueilImprimerRéalisé avec SCENARI